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07/03/2016

Le courage de changer (1)

DSC_1632.JPGJe souhaiterais partager un livre sur le désir et la nécessité de changer, publié en 1999 aux Editions Mondadori sous le titre Il coraggio di cambiare, et dont les auteurs sont un professeur de psychiatrie et un psychologue (Willy Pasini, Donata Francescato, Le Courage de changer, Editions Odile Jacob, 2001).

Il existe des facteurs internes et externes qui favorisent ou freinent le changement que nous souhaitons ou dont nous avons besoin pour nous renouveler. Notre attitude face au changement dépend de notre histoire familiale, des changements qui sont intervenus dans la vie de nos parents, de notre estime de soi et de notre confiance en nous-mêmes. Elle dépend du milieu dans lequel nous vivons, mais aussi de notre environnement social et culturel. Outre les différents sentiments qui peuvent nous animer, ce sont les styles de changement qui varient d’une personne à l’autre. Certains estiment contrôler leur vie: ils projettent, ils planifient, dans l’idée qu’ils ont le pouvoir de décider des événements. A l’opposé, on trouve les fatalistes, qui croient à la chance ou à la malchance, et qui sont persuadés qu’on ne peut agir sur le destin. Et puis, il y a les situations limites, quand le désir d’être l’artisan de sa propre vie se transforme en un délire de puissance, en un besoin obsessionnel et frénétique de contrôler tout et tout le monde, ou bien quand une trop grande passivité conduit à l’irresponsabilité, à l’incapacité à agir, à la résignation et, en dernier ressort, à la paralysie. 

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22/01/2016

Psychologie et mythologie

psychologie,mythologie,jung,freud,diel,symbole,psyché,éthique,action,intention,désir(Photo: Fèves de la Galette des Rois)

J’ai lu dans The Guardian un court article expliquant que, d’après les chercheurs, les contes de fées remonteraient à plusieurs millénaires. Ce n’est pas cette « découverte » qui a retenu mon attention (les lettres, c’est mon domaine d’expertise), mais le fait que l’article ait été partagé plus de 22.000 fois. Je pense que les lecteurs ont été séduits par un aspect qui évoque l’imaginaire ancestral, et qui représente, après tout, une vérité d’ordre psychologique. Jerome Bruner, l’un des fondateurs de la psychologie cognitive (et qui prend ses distances avec elle), montre que le récit est l’une des formes les plus universelles et les plus puissantes du discours et de la communication humaine. Notre esprit fonctionne comme un mécanisme narratif, le récit sous-tend toute notre existence, sa forme narrative est liée à l’entrée dans la culture. « Lorsque j’ai commencé mes recherches en psychologie, le béhaviorisme régnait en maître sur la psychologie. La méthode scientifique dominante consistait à étudier des rats dans les laboratoires pour comprendre des fonctions psychiques isolées : perception, apprentissage et mémoire. Mais ce qui m’intéressait en tant que psychologue, ce n’était pas les rats de laboratoire, mais les êtres humains. Je voulais comprendre comment les humains forgent une culture, créent des idées, des pensées, des univers mentaux. Or l’exploration des états mentaux des êtres humains -leurs rêves, leurs imaginations, leurs cultures -, je la trouvais plus dans la littérature, la poésie, le théâtre que dans la psychologie » (dans Les Nouveaux Psys, Editions des Arènes, 2008). On se souvient bien que Freud et Jung étaient d'excellents connaisseurs des lettres classiques et modernes, de l’art, de la philosophie.

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13/02/2015

Ethique et univers

éthique, bien, mal, désir, bonheur, philosophie, sciences, univers, complexité(Photos Nice: Pâquerettes)

 

Pour Thomas d'Aquin, le mal est une absence de bien, privatio boni, il dérive d'une perversion du bien. Nous faisons le mal parce que nous désirons le bien, et nous recherchons le bien de mauvaise façon. Le désir qui s'oriente vers le mal ne peut être qu'une perversion du désir, et celui qui convoite le mal le fait à cause d'un défaut, d'un manque dans sa capacité de désirer, une sorte d'infirmité. Pourquoi le mal serait-il donc nécessaire? D'abord, à cause de la constitution de l'homme comme créature, ensuite pour mettre mieux en évidence le bien. Si chaque objet est connu par rapport à son contraire, alors, s'il n'y avait pas de mal, le bien serait connu de façon moins déterminée, et par conséquent serait désiré avec moins d'ardeur. Si le bien doit être reconnu avant d'être désiré, il peut être reconnu avec plus de précision en étant mis en rapport avec le mal. En ce sens, le mal devient une occasion de bien. 

 

Jusqu'à la fin du XVIIIe, la poursuite du bonheur était quelque chose attaché au concept de bien, et aussi le ressort évident de toute action humaine. Pour les Stoïciens le bonheur ou le vrai bien découle directement de la vertu rationnelle -ne pas désirer, c'est être libre. L'adversité n'est pas dans les choses, mais dans le désir qui nous met en conflit avec les choses. C'est dans L'Ethique à Nicomaque que nous pouvons trouver une analyse rigoureuse du lien entre le bonheur et le souverain bien. En observant que "tous assimilent le fait de bien vivre et de réussir au fait d'être heureux", Aristote réfute toutes les positions visant à réduire le bonheur au plaisir, à la richesse, aux honneurs. Pour lui, le bonheur n'est jamais désirable en vue d'autre chose, il est toujours une activité menée conformément à la raison et en accord avec la vertu. En même temps, ce n'est que l'intellect qui délibère, car il permet non seulement d'expliquer une action, mais aussi de la justifier d'un point de vue éthique. D'où l'importance de la sagesse ou de la prudence, qui est pour lui "une disposition accompagnée de règle vraie, capable d'agir dans la sphère de ce qui est bien ou mal pour les êtres humains" (Ethique à Nicomaque, 1143 B 3-4). L'activité propre de l'homme réside dans l'activité de l'âme conforme à la raison, c'est-à-dire à la vertu. C'est pour cette raison que bonheur et vertu sont identifiés: si l'homme réalise son excellence par la vertu, si c'est par elle qu'il atteint sa fin propre, alors c'est elle qui doit être qualifiée de souverain bien. 

Pour Spinoza, qui recherche le Souverain Bien capable de se communiquer,  le bonheur n'est pas la récompense de la vertu, il est la vertu elle-même. 

 

On comprend ainsi que faire de la poursuite du bonheur un but en soi est une erreur. Il faudrait chercher autre chose que son propre bonheur, par exemple le bonheur d'autrui, l'amélioration de la condition de l'humanité, la justice sociale, aspirer à autre chose qui soit non pas un moyen, mais une fin idéale. Et alors, on découvrirait le bonheur chemin faisant. Peu importe le type d'activité que l'on fait, l'important c'est de placer son intérêt dans une fin idéale. 

La philosophie n'est pas que spéculation, elle vise à la sagesse dans sa dimension pratique. Je sais qu'il existe des tentatives de faire du développement personnel à partir d'une doctrine philosophique - appliquer telle ou telle doctrine philosophique dans notre vie. Il y a même des livres qui sont sortis. Je ne trouve en rien cette démarche séduisante, pour la simple raison qu'elle semble ignorer la mise à distance nécessaire pour la pensée, et aussi le rôle de la subjectivité et de l'expérience personnelle. Faire connaître, revisiter les philosophes, les présenter, les faire relire, et dégager ce qui est universel dans les catégories et les concepts, cela oui. Ce serait une démarche utile et respectueuse du raisonnement des individualités du XXIe que nous sommes. Autrement, la philosophie servirait à un autre type d'endoctrinement, lorsqu'elle se veut libératrice. 

 

De récentes découvertes en science laissent supposer que l'univers produit de façon naturelle de la complexité. Les scientifiques essaient de comprendre comment la structure simple de l'univers peut permettre la création de la complexité. L'émergence de la vie en général, et de la vie rationnelle en particulier, associée à sa culture technologique, pourrait être très courante, ce serait une tendance réelle de l'univers d'évoluer de façon prévisible. Le fait de croire que l'univers est structuré pour produire de la complexité en général, et des créatures rationnelles en particulier, n'est pas forcément une croyance religieuse, c'est-à-dire que cela n'implique pas forcément que l'univers a été créé par un Dieu, mais cela suggère que le type de rationalité que nous possédons n'est pas un accident. Il doit y avoir quelque chose de spécifiquement moral concernant les créatures rationnelles et sociales, et dans ce cas, les éventuels extraterrestres intelligents ont dû développer des attitudes similaires à partir de leurs engagements moraux de base. Un tel accord universel pourrait être un système éthique universel.    

27/06/2014

Parole et symbole

désir,parole,symbole,littérature,rhétorique,thèseC'est la qualité et la force du désir de s'ancrer dans le réel qui inscrit l'homme dans l'existence, et ce désir ne peut être que passionnel, et donc conflictuel. La conscience, une fois qu'elle se voit absorbée par ses passions, réalise tout ce qui la met à distance d'elle-même et la déchire. C'est alors qu'elle s'efforce de retrouver son unité, sa fusion avec elle-même, par la victoire sur ses passions ou par l'acceptation réfléchie de ce qui la conduira au bien. On rend les passions rationnelles en parlant d'elles, en leur faisant une place dans le discours, car l'homme est un être de désir, mais il est aussi un être de parole; entre l'ordre de l'Etre et l'ordre du Logos, l'ordre du Symbole sert de médiateur qui philtre. Le paradoxe heureux des passions, c'est qu'elles expriment une rationalité sous-jacente à nos aveuglements et à nos dérèglements, elles forment raison derrière le chaos des apparences. C'est par rapport à cette raison que les réponses diffèrent: ce qui nous semble sûr est qu'elle est d'ordre éthique, car autrement l'Histoire serait impossible. Le discours sur les passions en livre la raison, les abolissant et les préservant. Les passions racontées deviennent ainsi l'objet de l'esthétique et nous avons besoin d'y recourir car cela nous permet de durer, nous donne des raisons de vivre et restaure le courage.
 
 "La littérature, dont les principes organisateurs sont le mythe-c'est-à-dire l'histoire ou le récit- et la métaphore -c'est-à-dire le langage figuré et les images -est un monde libéré, le monde du libre épanouissement de l'esprit" (Northrop Frye, A Double Vision). La littérature se réapproprie les principes structurants de la mythologie, définie comme modèle culturel exprimant la manière dont l'homme peut réformer la civilisation dans laquelle il vit. La dialectique mythologique se résume à une oscillation entre ce que l'homme vit dans son monde,

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