Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

12/03/2015

Refuser la manipulation

manipulation, entreprise, santé psychologique, travail, leaders, gestion(Photos Nice - Le fleuriste rue Hôtel des Postes)
 
D'après la définition courante, la manipulation consiste à orienter notre perception de la réalité, en entrant par effraction dans notre esprit pour y déposer une opinion ou provoquer un comportement, sans que nous sachions qu'il y a eu effraction. Donc il s'agit d'une violence psychologique différente de la violence physique, qui, elle, passe à l'action explicite. Dans une note antérieure, j'évoquais quelques aspects de l'abus émotionnel. On peut se poser la question à quel moment, et à quel degré, on est manipulé sur le plan social, politique, psychologique, puisque cette tentative est omniprésente. Supposons que vous tombiez sur un site de santé qui vous promet des révélations en la matière, et vous invite à visionner une vidéo de ce que des chercheurs bibliques viennent de découvrir: un mystérieux message de guérison, un code, caché dans la Bible. Après avoir écouté/lu pendant 15 minutes un enregistrement dans lequel la pseudo-science et les indices du dogme religieux sont subtilement dosés (21e siècle oblige), vous voyez, enfin, le message s'afficher: clic sur ce bouton pour réclamer une Encyclopédie naturelle de la guérison, dont l'auteur est Docteur chercheur évangéliste. Tout cela a l'air d'être un brin plus élaboré que les miracles par icônes et reliques, dans lesquels excellent d'autres cultes. Ou bien, supposons que vous soyez d'accord pour optimiser votre vie en 10 étapes (vous souscrivez aux leçons): la clé du bonheur; l'optimisme ou apprendre à contrôler son esprit; le sens et la conscience de soi; les objectifs ou comment les créer pour être réellement motivé et heureux; l'action; l'énergie (nutrition, exercice, repos); la sagesse ou comment devenir un amoureux de la sagesse (alias un philosophe); le courage ou comment se débarrasser de ses peurs; l'amour ou comment optimiser ses relations; comment se connecter au plus haut de la sagesse qui se cache à l'intérieur de soi. Simple, pratique, rapide. L'auteur qui vous propose cette optimisation clé en main possède un diplôme en psychologie et business, et a déjà levé 8 millions pour créer une plateforme de design et de sports. 
Tout choix est une question de discernement, et pour que celui-ci arrive à opérer, il y a une condition: il faut consacrer un peu de temps à la réflexion. C'est un vrai travail et il paie, mais autrement. 

 


Les toujours plus nombreuses études sur la vie en entreprise révèlent qu'il est très difficile de créer un lieu de travail performant. Normalement, une culture d'entreprise moderne, dont les valeurs déclarées sont la transparence, l'intégrité, l'ouverture, la confiance, devrait intégrer une autre valeur indispensable -la santé psychologique. Les phénomènes qui accompagnent la récession (licenciements, pertes de bénéfices, insécurité de l'emploi) favorisent la méfiance des salariés à l'égard de leurs patrons -25% de salariés ne font pas confiance à leurs employeurs, selon American Psychological Association's Psychologically Healthy Workplace Program. Or, la confiance joue un rôle important et affecte également le bien-être du salarié et la performance du travail. Il est nécessaire de bien évaluer la santé mentale au travail afin de savoir gérer le stress, puisque celui-ci ne fait pas qu'endommager le psychique des employés, mais peut aussi compromettre la sécurité d'ensemble de l'entreprise. Quelques remèdes, en plus d'avantages spécifiques en matière de santé et de bien-être: faire participer davantage les employés aux décisions, fournir des possibilités pour élargir la connaissance et les compétences, ajouter des programmes qui facilitent l'équilibre travail-vie personnelle, tels les aménagements des horaires, ou la reconnaissance des employés pour leur contribution au succès de l'entreprise. L'environnement de travail peut s'en trouver amélioré par la formation des managers capables de mieux encourager les salariés, en leur donnant plus d'autonomie, et cela va faire diminuer le stress.
 
Récemment, on a pu voir le cas d'une ex-salariée de la banque UBS qui avait refusé de détruire des documents susceptibles de révéler l'existence d'un système d'évasion fiscale. En tant que lanceuse d'alerte, elle a été invitée pour s'exprimer sur les plateaux de télévision, et son harcèlement moral a été reconnu. Mais, voilà, personne n'accepte de l'embaucher, et elle vit avec les minima sociaux. Une règle non écrite du monde du travail dit qu'"il ne faut pas faire de vagues", et la salariée en a fait, poussée par les principes de démocratie et de transparence dont se targue le même monde.
 
Une autre réalité sont les chefs abusifs. Tout comme les gens grossiers ou agressifs, ils font partie de la vie, et notre seul choix est d'apprendre à les gérer, explique cet article américain, en citant une étude.  Nous sommes tous une combinaison de ces 5 traits de personnalité : ouverture, conscience, extraversion, agréabilité, neuroticisme (le modèle OCEAN). Steve Jobs a changé le monde et a fait des milliards, mais il était connu pour ses tirades insultantes en public contre ses collaborateurs. Il avouait que lorsqu'il se sentait frustré, malmener et rabaisser les autres était une sorte de catharsis, il arrivait à se sentir bien. 
Les compagnies savent que les personnes agressives perturbent le climat de travail en créant davantage de gens agressifs, en tuant la motivation et l'équipe, et en faisant au final que des gens s'en aillent, mais elles savent aussi que ces personnes-là peuvent produire des résultats. Tout comme nous savons que la mesquinerie paie. Une étude psychologique publiée dans le Journal of Personality and Social Psychology trouve que les gens moins agréables (selon l'échelle OCEAN) font plus d'argent que les autres. Ce n'est pas qu'ils soient nécessairement méchants, mais ils se désintéressent complètement des sentiments d'autrui. Cela est valable pour des leaders, qu'ils soient hommes ou femmes. Se faire un plaisir à rabaisser quelqu'un dans une réunion est une faute qui n'a pas de genre. En observant que ces personnes sont une réalité du lieu de travail, tout comme l'e-mail, l'article résume ce qu'il est toujours possible de faire lorsqu'on se voit obligé de travailler avec elles. Se concentrer sur leur intention, non sur leur style (pour certains, l'agressivité est une manière calculée de délivrer un message); écouter ce qu'elles disent (le sens, l'intention), non comment elles le disent; rapporter le problème (enquêtes internes, parler à un autre responsable); prendre des notes (d'autres victimes doivent exister); ne pas abandonner son pouvoir (parfois l'agressivité de l'autre a pour but de prendre le contrôle); élever la confrontation quand c'est nécessaire. Les employés qui se sont dressés contre un chef hostile -même de manière passive agressive, en l'évitant ou en diminuant l'effort fourni- éprouvent moins le sentiment d'être des victimes, et plus le sentiment d'être des maîtres de leur vie. Cela ne représente pas pour autant une stratégie de carrière idéale, et il est plutôt recommandé de confronter l'antagoniste, de rapporter son comportement, de changer d'emploi, en dernier lieu. 

Les commentaires sont fermés.