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01/09/2017

La recherche actuelle

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(Photo- Soleil et nuages)

Est-ce que les pratiques bouddhistes peuvent nous aider à surmonter l’insatisfaction? (Can buddhist practices help us overcome the biological pull of dissatisfaction ?)

Les humains sont-ils programmés dans leur cerveau à être perpétuellement insatisfaits? L’auteur Robert Wright, qui enseigne l’interface de la biologie évolutive avec la religion, croit que oui. Il observe que les gens cherchent le plaisir plutôt que la souffrance, ce qui mène à la conclusion que les humains sont le plus souvent insatisfaits. « Nous voulons toujours quelque chose de plus, quelque chose de différent, nous ne sommes pas destinés, par la sélection naturelle, à être heureux. » Certaines pratiques bouddhistes peuvent aider les humains à éviter d’être tirés par le biologique vers l’insatisfaction. « Je crois que la méditation pleine conscience est presque une rébellion contre la sélection naturelle. Certes, la sélection naturelle est le processus qui nous a créés, qui nous a donné des valeurs. Elle a programmé les animaux en général à être insatisfaits de manière récurrente, sinon ils n’auraient pas pu transmettre les gènes et évoluer. Par la pratique de la pleine conscience, nous pouvons ne pas fuir les émotions négatives, mais les affaiblir ».

Quels facteurs forment notre empathie? (Which Factors Shape our Empathy ?)

L’empathie affective se réfère à des émotions innées qui surgissent quand d’autres expriment leur émotion. L’empathie cognitive se réfère à notre compréhension des émotions des autres. Les deux sont soutenues par des voies distinctes dans le cerveau et surgissent à des moments différents. Elles peuvent interagir pour s’influencer réciproquement. L’empathie affective et cognitive influencent et sont influencées par d’autres systèmes biologiques et processus qui contribuent quotidiennement à nos sentiments, pensées, croyances, décisions, comportement. Les grands lecteurs sont toujours empathiques, les femmes semblent avoir une meilleure empathie affective que les hommes, les adultes sont plus empathiques que les jeunes générations. Existe-t-il une corrélation entre le revenu et l’empathie ? Cela n’est pas clair, mais des études menées suggèrent que l’empathie décline en général à mesure que les revenus augmentent.. Notre niveau d’empathie semble être formé par des facteurs comme le genre, l’âge, les rôles que nous avons eus dans notre famille d’origine. Mais l’empathie est aussi une compétence que nous pouvons développer avec un peu d’effort.

 


Les limites de la compassion humaine (A Psychologist Explains the Limits of Human Compassion) 

Plus le nombre de victimes d’une tragédie va augmenter, plus notre empathie et notre volonté d’aider vont décroître. Il n’existe pas de valeur constante attribuée à une vie humaine. Une recherche (Paul Slovic, psychologue à l’Université de l’Oregon) montre comment les gens évaluent les choses dont la quantité augmente au fur et à mesure. Les changements à petits niveaux ont un grand impact. La différence entre 0$ et 100$ est mieux ressentie que la différence entre 100$ et 200$, ou entre 5800$ et 5900$, toujours pour 100$ de différence. Si l’on applique aux vies, c’est pareil. Cela nous rappelle les travaux de Daniel Kahnemann et Amos Tversky dans les années ’70 sur la théorie des perspectives (prospect theory) et sur l’attitude face au risque. La théorie des perspectives est un modèle alternatif au modèle normatif de l’utilité espérée, et elle a joué un rôle fondateur dans les développements ultérieurs de la théorie des choix risqués.

Nous sommes réceptifs aux histoires individuelles. Les photos individuelles peuvent aussi être efficaces pour un certain temps. Elles captent notre attention, nous obligent à jeter un autre regard sur la réalité, à nous connecter émotionnellement à une échelle que nous pouvons comprendre. (On se souvient de l’impact de la photo du petit garçon syrien mort sur la plage. Les gens en ont été émus et ont commencé à se soucier de la guerre en Syrie et des réfugiés plus qu’ils ne l’avaient fait après les statistiques sur les centaines de milliers de morts. Slovic appelle cela « the psychic numbing », disons « l’esprit paralysé ». Il opère dès que le nombre de victimes passe de 1 à 2. Le système des émotions n’additionne pas, il ne sait pas multiplier, il ne sait pas manier les nombres. Il est maximisé au nombre 1 : « Me protéger moi-même. Protéger la personne en face de moi ». Nous ressentons une forte réponse émotionnelle quand les gens qui sont comme nous, proches de nous, près de nous, se trouvent en danger. Paul Slovic considère qu’il y a trois obstacles aux crises humanitaires majeures : le premier est la réponse qui paralyse (abrutissante) ; le deuxième est le sentiment d’impuissance (ce que nous faisons ne va pas compter); le troisième est l’effet d’importance (prominence effect).

Les émotions sont-elles innées ou fabriquées ? (Are Emotions Born or Made?)

Les premiers scientifiques qui se sont penchés sur l’étude des émotions ont gravité autour d’une théorie de l’universalité de celles-ci : les émotions sont innées, elles sont des réactions ayant un support biologique à certains défis et occasions, et sont déterminées par l’évolution pour aider les humains à survivre (les émotions fondamentales). Un livre récent (Lisa Feldmann-Barrett, How Emotions are Made) propose une autre perspective. Les émotions ne seraient pas des réponses innées et automatiques, mais apprises, basées sur nos expériences et notre connaissance antérieure. Les émotions sont une réalité sociale. Les psys sont d’accord qu’elles ne peuvent pas être signalées exclusivement par l’expression faciale ou l’empreinte vocale, le rythme cardiaque, l’afflux du sang, l’activation cérébrale, ou le comportement. Sans abandonner la vue des « universalistes », on reconnaît que les émotions sont plutôt soutenues par plusieurs processus : comportements expressifs (visage, voix, posture, toucher, indices olfactifs, langage) à côté de modèles d’activation physiologique neurale et périphérique que nous ne pouvons capter parce que nous ne possédons pas encore la technologie adéquate. Comment interagissent la nature et la culture dans le cas des émotions ? A ce jour, les études n’offrent pas une carte de nos empreintes pour nos différentes émotions, mais les neuroscientifiques continuent à examiner cette possibilité.

On décompose une émotion ainsi: le ressenti ou la sensation physique (le noyau); l’interprétation de ce qui se passe dans l’environnement (le sens qui lie ce que la personne a appris concernant cette situation ou sentiment); le comportement exprimé (les implications comportementales de ce sens). Les émotions construites sont apprises, tandis que les émotions universelles sont déjà là. Ce que nous avons appris dans la vie va influencer dramatiquement, et souvent inconsciemment, nos expériences émotionnelles. Ce qui suggère que nous pourrions en devenir plus conscients et modifier le cours de nos propres émotions. La pleine conscience facilite l’accès sans jugement aux pensées et aux sensations, elle permet un état d’esprit où les attentes apprises ont moins d’influence sur l’expérience en train d’être vécue. Par exemple, nous nous attendons à être en colère lors d’une dispute, parce que cela s’est passé ainsi. Sans cette attente, nous pourrions en réalité entendre l’autre et avoir plus de chance pour une solution constructive. Selon le psychiatre et le neuroscientifique Judson Brewer, les pratiques de méditation pleine conscience adoucissent nos attentes égocentriques, que nous ressentions ou non des émotions, au bénéfice de notre bien-être. Des recherches complémentaires suggèrent que détourner nos pensées des typiques histoires égocentrées « Je suis » ou « Je ressens », qui surgissent pendant des moments difficiles, pourra améliorer notre bien-être. Supprimer les émotions serait, en revanche, dommageable pour notre bien-être et pour nos interactions sociales. Les recherches montrent que les individus diffèrent dans leurs stratégies de régulation des émotions (la réévaluation et la suppression) et que ces différences individuelles ont des implications pour l’affectivité, le bien-être et les relations sociales. 

Une découverte récente (Adult Brain Produce New Cells in Previously Undiscovered Area) pourrait conduire à de nouveaux traitements contre l’anxiété, le stress post-traumatique, la dépression: les chercheurs de l’Université de Queensland ont eu des preuves évidentes de neurogenèse dans l’amygdale. Le cerveau adulte produit de nouvelles cellules dans l’amygdale, cette région très importante dans le processus des souvenirs émotionnels.

Le système immunitaire contrôle le comportement social (Scientists Discover that the Immune System Controls Social Interaction)

Les chercheurs de l’Université de Virginie (Virginia School of Medecine) ont déterminé que le système immunitaire affecte directement et contrôle le comportement social des êtres, par exemple leur désir d’interagir avec d’autres. Peut-on déduire que des troubles du système immunitaire contribuent à une incapacité à avoir des interactions sociales normales? Il semble que la réponse soit affirmative, et que cette découverte puisse avoir d’importantes implications quant à l’état neurologique de l’autisme et de la schizophrénie. « Le cerveau et le système immunitaire adaptatif ont été considérés comme étant isolés l’un de l’autre, et maintenant nous montrons qu’ils interagissent étroitement, et que certains traits de notre comportement ont évolué en réponse de notre système immunitaire aux pathogènes », explique Jonathan Kipnis, PhD Chairman of UVA’s Department of Neurosciences. Une partie de notre personnalité est probablement dictée en réalité par le système immunitaire. L’année dernière, Kipnis et son équipe ont découvert que les vaisseaux méningés lient directement le cerveau au système lymphatique, ce qui est en train de renverser l’enseignement de décennies sur le cerveau considéré comme « immunisé privilégié » et sans lien direct au système immunitaire. La découverte ouvre la porte à de nouvelles pistes de réflexion sur comment les deux interagissent. La relation entre les humains et les pathogènes, suggèrent les chercheurs, a dû probablement affecter directement le développement de notre comportement social, nous permettant de nous engager dans des interactions sociales nécessaires pour la survie des espèces, tout en développant des modalités pour notre système immunitaire de nous protéger des maladies qui accompagnent ces interactions. Le comportement social est, bien sûr, dans l’intérêt des pathogènes, et cet intérêt consiste à se répandre. Une molécule spécifique fabriquée par l’organisme et ayant des propriétés antivirales, les interférons gamma, est essentielle dans le comportement social, et une variété d’êtres (mouches, poissons, rats et souris) activent des réponses en interférons gamma dans leur comportement social. Normalement, cette molécule est produite par le système immunitaire comme réponse aux bactéries, virus et parasites. Bloquer cette molécule chez des souris (par modification génétique), rend le cerveau hyperactif et la souris moins sociale. Rétablir la molécule ramène la connectivité du cerveau et du comportement au niveau normal. Donc, la molécule de l’immunité joue un rôle profond dans le maintien normal de la fonction sociale.

Les chercheurs observent qu’un mauvais fonctionnement du système immunitaire est responsable de déficits sociaux dans de nombreux troubles neurologiques et psychiques. Les molécules immunitaires définissent en réalité comment le cerveau fonctionne. Donc, quel est l’impact de notre système immunitaire sur le développement et le fonctionnement de notre cerveau ? « Je pense -dit Kipnis- que les aspects philosophiques de ce travail sont très intéressants, mais que ce travail a aussi de très importantes implications cliniques. »

 

Références : Ces quelques informations adaptées en français peuvent être retrouvées dans les articles d’origine sur la page Facebook Cefro. 

 
 

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